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Page:Georges Eekhoud - Escal-Vigor.djvu/91

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ESCAL-VIGOR

sait de lui. Combien il tardait à Blandine de le voir ! Elle languissait même en l’attendant. Et voilà qu’une sinistre nouvelle arriva de Suisse au moment des vacances qui devaient le rendre à son aïeule : Henry était tombé malade. Jamais Blandine n’avait connu pareilles transes. Elle aurait volé au chevet du collégien si elle n’avait été retenue près de l’aïeule, suspendue elle-même entre la vie et la mort tant que son petit-fils ne fut hors de danger. Puis, quelle jubilation quand Blandine apprit le rétablissement du jeune homme.

La perspective du retour au pays, de cet enfant tant choyé, ne rendait pas Blandine la moins anxieuse des deux femmes. Elle comptait les jours et, puérilement, les biffait sur un calendrier, comme le collégien devait le faire là-bas.

Quand Henry sonna à la grille de la villa, ce fut Blandine qui lui ouvrit. Elle crut voir un dieu. Tout son sang reflua vers son cœur. Elle l’adora d’emblée, respectueuse, sans espoir intéressé, sans ambition, pour lui-même, et comprit qu’en vivant toujours en la présence du jeune Kehlmark, elle aurait tout son désir, tout le but de ses aspirations. Plus tard, elle se rendit un meilleur compte de ce qui s’était produit en elle dès cette première mais