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Page:Gervaise de Latouche - Histoire de Dom Bougre, Portier des Chartreux,1922.djvu/130

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Mais il n’est pas encore temps de raconter ce qui m’arriva à son sujet.

Mademoiselle Nicole (c’était le nom de cette aimable personne), telle que je viens de vous la présenter, était l’objet des tendres vœux de tous les pensionnaires. Les externes voulaient aussi s’en mêler ; les grands étaient assez bien reçus, les petits fort mal. Je n’étais pas des plus grands, par malheur pour moi. Ce n’est pas que je n’eusse plusieurs fois tenté de pousser ma pointe auprès de cette aimable pouponne, mais mon âge parlait encore contre moi. On avait toujours eu la cruauté de refuser de m’admettre à la preuve que j’offrais de donner, que je n’étais jeune que par la figure, et pour achever de me désespérer, on ne manquait pas de confier mes entreprises amoureuses à la dame Françoise, la dame Françoise les confiait à monsieur le curé, et celui-ci ne me ménageait pas. J’enrageais d’être petit, car je voyais bien que c’était là la cause de tous mes malheurs.

La difficulté de réussir auprès de Nicole m’avait dégoûté. Des rebuts de la part de la nièce, les étrivières de la part du curé ; il n’y avait pas moyen d’y tenir. Tout cela n’avait pourtant pas éteint mes désirs ; ils n’étaient que cachés, la présence de Nicole les ralluma. Il ne manquait plus qu’une occasion qui leur donnât la liberté d’éclater, elle ne tarda pas à venir ; mais l’ordre des faits exige que cette aventure n’aille qu’à son tour, et son tour n’est pas encore venu : c’est celui de madame Dinville.

Je n’avais pas oublié que cette dame m’avait fait promettre d’aller dîner avec elle le lendemain. Je me couchai dans la résolution de lui tenir parole, et on juge bien que le jour ne changea rien à cette résolution. Si