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Page:Gervaise de Latouche - Histoire de Dom Bougre, Portier des Chartreux,1922.djvu/182

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— Nicole, criait-elle en frappant contre la cloison, misérable Nicole, finiras-tu ?

Nouvelles alarmes de notre part ; mais me mettant bientôt au-dessus de la crainte, je dis à Nicole que, puisque nous étions découverts, il était inutile de nous gêner. Elle approuva par son silence cette résolution courageuse, et me donnant elle-même le premier coup de cul, en me remettant sa langue dans la bouche, elle me piqua d’honneur, et tels que de généreux guerriers qui, bravant dans leurs lignes de feu d’une artillerie meurtrière braquée contre eux sur un rempart, continuent tranquillement leur ouvrage et rient du bruit impuissant du canon qui gronde sur leurs têtes, nous travaillâmes intrépidement au bruit des coups que Françoise donnait contre la cloison. Nous achevâmes ; et, soit que l’interruption, soit que le bruit que la vieille faisait encore eût donné une pointe de vivacité à nos plaisirs, nous nous avouâmes réciproquement que nous n’en avions pas encore goûtés d’aussi vifs.

Le faire cinq fois en fort peu de temps, ce n’était pas mal s’en tirer pour un convalescent, convalescent encore de quelle maladie ! Je sentais cependant que je n’étais pas tout à fait hors de combat ; il fallait avoir de la sagesse pour ne pas se laisser aller. Je l’eus, cette sagesse, je triomphai de mon envie. Il faut pourtant convenir que la réflexion eût bonne part dans ma modération. La dame Françoise pourrait à la fin s’impatienter de ce petit manège, des honnêtes remontrances passer aux cris, des cris, que sais-je ? sonner le tocsin sur nous, ou peut-être venir faire sentinelle à notre porte. S’exposer au risque d’être arrêtés au passage ? Mauvaise affaire. Rester dans la chambre, assiégés jusqu’au jour ? Au bout du compte, il aurait fallu sortir. Com-