Page:Gervaise de Latouche - Histoire de Dom Bougre, Portier des Chartreux,1922.djvu/70

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— Ces actions, lui répondis-je, c’est de me baiser à la bouche, en me disant de m’approcher pour qu’il entende mieux, de me considérer attentivement la gorge pendant que je lui parle, de me mettre la main dessus, et me défendre de la montrer, sous prétexte que c’est une marque de coquetterie ; et, malgré ses sermons, il ne tire pas la main, qu’il avance de plus en plus sur mon sein et pousse même quelquefois jusqu’à mes tétons. Quand il l’ôte, c’est pour la porter aussitôt sous sa robe, qu’il remue avec de petites secousses. Il me presse alors entre ses genoux ; il m’approche avec sa main gauche, il soupire, ses yeux s’égarent ; il me baise plus fort qu’à l’ordinaire, ses paroles sont sans suite ; il me dit des douceurs et me fait des remontrances en même temps. Je me souviens qu’un jour en retirant la main de dessous sa robe pour me donner l’absolution, il me couvrit toute la gorge de quelque chose de chaud qui se répandit par petites gouttes. Je l’essuyai au plus vite avec mon mouchoir, dont je n’ai pas pu me servir depuis. Le Père tout interdit, me dit que c’était de la sueur qui coulait de ses doigts. Qu’en pensez-vous, ma chère Monique ? dis-je à la Sœur.

— Je te dirai tout à l’heure ce que c’était, me répondit-elle. Ah ! le vieux pécheur ! Mais, sais-tu bien, Suzon, continua-t-elle, que tu viens de me conter ce qui m’est arrivé avec lui ?

— Comment donc ! lui dis-je, vous ferait-il aussi quelque chose à vous ?

— Non, assurément, me répondit-elle, car je le hais à la mort, et je ne vais plus à lui depuis que je suis devenue plus savante.

— Et comment avez-vous donc appris, lui demandai-je, à connaître ce qu’il vous faisait ?