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Page:Gervaise de Latouche - Le Portier des Chartreux, 1889.djvu/154

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font de tout ce qu’elle condamne l’objet de leurs occupations ? Non, c’est l’usage. Les cordeliers, les carmes, les minimes, me justifient assez. On en sait mille histoires, sans celles que nous ignorons.

Qu’on me permette de réfléchir un peu sur la vie que nous menions, et de démontrer à quel point les moines sont corrompus. Quelles raisons assez puissantes ont pu rassembler dans le cloître tant de caractères différents ? La paresse, la paillardise, le mensonge, la lâcheté, la perte des biens et de l’honneur.

Pauvres gens, qui croyez que c’est la religion qui peuple les cloîtres, que ne pouvez-vous en pénétrer l’intérieur ? Indignés de leur iniquité, vous en rougiriez et vous apprendriez à les mépriser ; Levons le bandeau qui vous couvrait les yeux. Dites-moi, vous qui avez connu le père Chérubin, cet homme qui ne respire que le plaisir, vous, dis-je, qui l’avez connu avant qu’il fût moine, comment vivait-il ? Il ne se couchait pas qu’il n’eût sablé dix bouteilles du meilleur vin, et souvent le jour le trouvait enterré sous la table parmi les débris du souper. Il a quitté le monde, Dieu l’a illuminé de sa grâce ; il lui a montré le bon chemin. Je n’examine pas si c’est le ciel ou ses créanciers qui ont fait ce miracle ; mais sachez que le père Chérubin tiendrait encore tête aux plus intrépides buveurs ; il boirait et mangerait le revenu du couvent.