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Page:Gide - Principes d’économie politique.djvu/274

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un pays peut se trouver en excès. Le fait s’est produit plus d’une fois, mais ces variations n’ont jamais l’amplitude et les fatales conséquences qu’entraîne toute variation dans la quantité de papier-monnaie, parce qu’elles s’étendent sur toute la surface du monde civilisé : partout recherchés et reçus, les métaux précieux, s’ils sont en excès dans un pays, ne tardent pas à refluer d’eux-mêmes dans les autres pays, tandis que les crues subites du papier-monnaie — étant toujours renfermées dans les limites d’un pays déterminé, qui forme comme un réservoir clos et en dehors duquel elles ne peuvent se déverser — sont désastreuses.

Les inconvénients que nous venons de signaler et qui font du papier-monnaie un instrument si imparfait comparativement à la monnaie métallique, disparaîtraient presque complètement si l’on imaginait une convention internationale conclue entre tous les pays civilisés et par laquelle ils s’engageraient tous :

1° à donner cours légal à un même papier-monnaie ;

2° à n’en pas augmenter la quantité, ou à ne l’augmenter que dans une proportion déterminée à l’avance et calculée pour chaque pays, par exemple, d’après l’accroissement de sa population.

En ce cas, la valeur du papier-monnaie, quoique toujours conventionnelle, artificielle si l’on veut, néanmoins par le seul fait qu’elle reposerait sur le consentement unanime des peuples, aurait désormais une assiette aussi large et plus stable que la valeur de la monnaie métallique elle-même. Et comme sa quantité serait réglée par les prévisions scientifiques et non plus par le jeu du hasard, il est à croire que sa valeur serait moins sujette à varier. C’est probablement sous cette forme que sera la monnaie de l’avenir (Voy. ci-après, p. 282).

En somme le caractère de la monnaie de papier d’être artificielle n’est pas un signe d’infériorité : bien au contraire. Le chronomètre est un instrument artificiel pour mesurer les heures, tandis que le soleil est un instrument naturel. Cela n’empêche pas que le premier ne soit, pour cet usage, fort supérieur au second. C’est même la caractéristique du pro-