Aller au contenu

Page:Gilkin - La Nuit, 1897.djvu/102

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Vierge et doux guérisseur de la terre charnelle
Qui se meurt de péché, d’angoisse et de remord.
Aux larges bras sanglants de la Croix éternelle
Où les divines morts feront mourir la mort.

La Bête tortueuse et splendide, l’immonde
Serpent de feu, l’ardent Reptile du Désir
Qui broie entre ses nœuds magnétiques le monde,
Se fit femme et t’offrit les fruits mous du plaisir.

Tu cédas aux baisers, abandonnant ton âme
Aux cœurs de chair, aux yeux de chair, aux pleurs de chair,
Faible esclave écrasé sous les pieds de la Femme,
Ô toi qui dévorais les cieux comme un éclair !

Et te voilà rampant dans la fange natale,
Banal outil de chair perpétuant la chair,
Simple anneau désormais de la Bête vitale
Qui tord dans l’infini son long ventre de ver.

Ah ! pleure à présent ta divinité perdue !
Jamais tu n’erreras, beau, souffrant, surhumain,
Par les champs palpitant de ta gloire attendue,
Au bord des lacs heureux et pâmés sous ta main ;