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Page:Gilkin - La Nuit, 1897.djvu/258

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Non moins que des plaisirs, tu nous fais des devoirs.
Pour soûler les soldats de généreux espoirs,
Tu leur verses, ô Dieu du sang, tes poisons noirs.

Ton aile rouge passe à travers les tueries
Et sur les fronts martyrs flotte en palmes fleuries
Dans les temples de Dieu changés en boucheries.

Pour stimuler l’ardeur des esprits curieux,
Ta main de flamme écrit des mots mystérieux
Qu’épèle en bégayant le savant anxieux.

Tu caches si bien Dieu sous les décors du culte,
Qu’échangeant à l’envi la torture ou l’insulte,
Les clergés ennemis te servent en tumulte.

De toi, dieu de l’argent, vient la prospérité ;
Tu fais puissant l’État et riche la Cité ;
Tu dispenses la gloire et l’immortalité.

Ô civilisateur, ta suprême malice
Inventa la morale et l’humaine justice
Qui vers le ciel sanglant font fumer le supplice.

Tu rives tour à tour et tu brises nos fers,
Martelant sans relâche aux forges des enfers
La contradiction, pivot de l’univers.