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Page:Girard - Rédemption, 1906.djvu/111

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Rédemption.

finement cambré, chose surprenante chez cette héritière de sang roturier.

Dans l’absorbante quiétude du calme dominateur de cette après-midi de dimanche, alors que pas un bruit du travail de l’homme ne parvenait à ses oreilles, que la nature sauvage seule donnait signe de vie, Réginald si près de Romaine eut peur.

Jamais elle ne lui avait paru si belle, si séductrice, si chaire divinement tentante et irrésistible.

Ils marchaient en se frôlant le coude, échangeant quelques courtes observations aussitôt suivies de longs silences. S’arrêtant parfois, ils cueillaient sur la grève une jolie pierre ou un coquillage éclatant.

Comme il ventait toujours très fort, Réginald tenait son panama à la main, son épaisse chevelure agitée en tous sens.

Romaine avait porté une de ses mains à la hauteur de sa tête pour retenir sa coiffure. Dans cette pose toute de grâce, l’étoffe, qui se confondait avec la naissance de la gorge radieusement blanche et tranchait avec les lourdes tresses d’or rouge, dissimulait mal la rondeur du sein ferme de la vierge.

Tous deux laissaient l’empreinte de leurs pas sur le sable humide, et parfois la vague roulante venait jusqu’à eux en leur mouillant les pieds.

Un coup de vent ayant failli emporter le chapeau de Romaine, elle dit :

— Allons nous mettre à l’abri de ce côté-là du quai ! Venez-vous ?

Sans répondre il la suivit.

Maintenant, ils ne parlaient plus.

Ils descendirent une légère pente, et s’assirent sur une des grosses roches formant un escalier abrupt de trois ou quatre marches.