Page:Gobineau - Souvenirs de voyage. Cephalonie, Naxie, et Terre-Neuve , 1872.djvu/123

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colères, mais dont en ce moment il ne restait pas une goutte d’eau, se dressaient, par touffes épaisses, de beaux lauriers luxuriants ; pourtant ce luxe ne se révélait que quand on l’avait cherché avec peine ; belle image de la gloire, elle ne se rencontre pas sur les sentiers faciles. Charles Scott, l’aspirant écossais, trouva pourtant moyen de cueillir deux bouquets. Il offrit le premier à Akrivie en rougissant jusqu’aux oreilles, au passage d’une sorte de petit défilé où il crut n’être vu de personne ; le second, elle le trouva le soir auprès de son lit, le coupable l’ayant remis à Thompson avec l’horrible mensonge que la jeune demoiselle l’avait cueilli elle-même, et qu’il s’était chargé de le porter. De sorte qu’Akrivie eut ce jour-là, dans l’état-major de l’Aurora, deux amoureux et une foule d’admirateurs. Norton s’apercevait qu’il avait un rival ; mais il n’en était point inquiet, et loin d’en concevoir de l’humeur, il sentit augmenter sa sympathie ancienne pour l’audacieux, son protégé de tout temps. La mère de Charles Scott, veuve d’un clergyman et sans aucune fortune, possédait deux enfants, une fille aînée, Effie, à peu