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Page:Goncourt - Journal, t1, 1891.djvu/42

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stitue l’homme, je l’ai encore, » — fait-il en souriant.

Il nous montre une lettre de Victor Hugo, apportée par Mlle Thuillier, et où il nous fait lire cette phrase : « Il fait triste ici… il pleut, c’est comme s’il tombait des pleurs. » Dans cette lettre, Hugo remercie Janin de son feuilleton sur la vente de son mobilier, lui annonce que son livre va paraître dans un mois, et qu’il le lui fera parvenir dans un panier de poisson ou dans un cassant de fonte, et il ajoute : « On dit qu’après, le Bonaparte me rayera de l’Académie… Je vous laisse mon fauteuil. »

Puis, Janin se répand sur la saleté et l’infection de Planche, sa bête d’horreur : « Vous savez, quand il occupe sa stalle des Français, les deux stalles à côté restent vides. Sa maladie, c’est l’éléphantiasis… un moment on a espéré qu’il avait la copulata vitrea de Pline. Il l’aurait eue, oh ! il l’aurait eue… s’il s’était tenu un rien du monde moins salement ! »

Une petite actrice des Français, dont je ne sais pas le nom, lui demandant s’il a vu une pièce quelconque : « Comment, s’écrie Janin, en bondissant sur son fauteuil, vous n’avez pas lu mon feuilleton ! » Et là-dessus il la menace, il la terrorise de ne jamais arriver, si elle ne lit pas son feuilleton, si elle n’est pas au fait de la littérature, si elle ne fait pas comme Talma, comme Mlle Mars, qui ne manquaient jamais un feuilleton important.

— Sur le trottoir de la rue Saint-Honoré, j’entends derrière moi une fille disant à une autre : « Ah !