Page:Goncourt - Journal, t4, 1892.djvu/300

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Lundi 1er mai. — Des bataillons revenant d’Issy et traversant le boulevard, précédés d’une joyeuse musique, d’un tapage de gaieté, qui fait contraste avec la mine piteuse des hommes, et la prostration dans laquelle ils marchent. Au milieu d’eux marque le pas une femme, le fusil sur l’épaule. Derrière suivent deux voitures pleines de fusils. On dit, dans la foule, que ce sont les fusils des morts et des blessés.

Mardi 2 mai. — Depuis le 18 mars, je n’ai pas vu à l’étalage d’un seul changeur un billet, un louis, une pièce de cinq francs. C’est peut-être le plus topique témoignage de la confiance qu’inspire à l’Argent, la Commune.

Mercredi 3 mai. — Des femmes de coiffeurs, il y en a encore à Paris, mais des coiffeurs peu, et des garçons coiffeurs, pas du tout, en sorte que, pour se faire couper les cheveux, on est obligé de faire cinq ou six boutiques.

Un frêle échafaudage commence à monter le long de la colonne Vendôme et à étreindre son bronze glorieux.

Une circulaire de la guerre fait assavoir aux gardes nationaux : que, comme l’envoi d’un parlementaire peut être une ruse de guerre, il faut continuer à tirer, quand même l’ennemi a cessé le feu… Et en même temps une affiche du citoyen Rossel, en ré-