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Page:Goncourt - Journal, t4, 1892.djvu/51

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camions ! En haut sur le couronnement, l’exercice du canon par des pékins, en bas l’exercice des fusils à tabatière par des gardes nationaux. À tout moment, le passage des blouses bleues, noires et blanches des mobiles, et dans l’espèce de canal de verdure du chemin de fer, l’éclair rapide des trains, dont on ne voit que le dessus tout rouge de pantalons, d’épaulettes, de képis de cette population militaire, improvisée dans la population bourgeoise.

Le Champ-de-Mars est toujours un camp, où la gaudriole soldatesque a fusiné, sur la toile grise des tentes : « On demande des bonnes pour tout faire ! » Des files interminables de chevaux descendent boire à la Seine, et longent le quai, où des barrières de grosses cordes enferment des trains d’artillerie et des équipages de pontonniers.

Les Champs-Élysées qui ne sont plus arrosés : une tourmente de poussière, à travers laquelle apparaît une multitude armée, et de temps en temps, l’éclair du casque d’une estafette, se détachant, au bas de l’avenue, sur le ciel violet, sur l’obélisque tout blanc.

À la place de la Concorde, un rassemblement aux pieds de la statue de Strasbourg. Une échelle humaine est faite d’hommes en blouse, qui, grimpés après sa pierre blanche, et accrochés au geste canaillement puissant du poing de la statue sur sa hanche, fleurissent la ville héroïque, de branchages, de fleurs, de drapeaux, d’oripeaux patriotiques, tandis qu’au-dessous, des ronds de chapeaux noirs,