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Page:Goncourt - Journal, t5, 1891.djvu/113

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La nuit se fait fraîche. La pâleur de François Hugo devient verte. Le grand homme, tête nue, en petite jaquette d’alpaga, n’a pas froid, est plein de vie débordante. Et la montre inconsciente de sa puissante et robuste santé près de son fils mourant, fait mal.

16 août. — Je suis tombé hier sur Hugo, en conférence avec La Rochelle, pour la représentation de Marie Tudor.

C’était une scène de comédie du plus haut comique. Le thème de Hugo avec le directeur de théâtre était simple. Il lui disait : « Moi, il n’y a plus qu’une chose qui m’intéresse, c’est de jouer avec mes petits-enfants, tout le reste ne m’est plus de rien. Ainsi, faites absolument comme vous l’entendrez, vous êtes, n’est-ce pas, bien plus intéressé que moi au succès de la pièce. » Puis, au bout de tous ces apparents abandonnements, apparaissait sournoisement le nom de Meurice, de l’excellent Meurice, à qui La Rochelle devait référer, en dernier ressort, pour tout. Et toujours à la suite de cela, le refrain : « Moi, jouer avec mes petits-enfants, c’est tout ce que je demande. »

En se levant, La Rochelle, mis à l’aise par la débonnarité du grand homme, lui demandait si Dumaine ne pourrait pas jouer, deux ou trois fois, dans je ne sais quelle pièce : « Voyez-vous, répondait Hugo, à ce que vous demandez, je vais vous