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Page:Goncourt - Journal, t8, 1895.djvu/85

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profonde qu’il possède de toutes les questions qu’il aborde, par le jugement original qu’il porte sur elles, par l’indépendance de son esprit à l’endroit de toutes les idées reçues, de tous les clichés acceptés, etc. Un petit homme aux yeux noirs, à la barbe grêle, au teint marbré de plaques rougeaudes, au crâne à la conformation assez semblable à celui de Drumont. Il se met à parler de la situation politique, du désarroi du moment, de l’avènement futur de Boulanger.

Il s’est trouvé avec lui à la Flèche, il a été de sa promotion, et dit que ce qui le caractérise, c’est qu’il est un étranger, un Écossais par sa mère, un homme qui ne connaît pas le ridicule, qui se promènerait dans une voiture rouge d’Old England… qu’au fond il méprise les Français. Il ajoute qu’il est menteur, menteur, qu’il a une très moyenne intelligence, mais une volonté enragée, avec le talent, un talent tout particulier de parler à la corde sensible des gens auxquels il s’adresse, et qu’il a très souvent la bonne fortune des mots qui enlèvent, enfin qu’il est un allumeur de foules.

On s’entretient ensuite de Freycinet, l’homme funeste, le ministre dont Bismarck a dit un jour : « Il m’apparaît comme le ministre d’un grand désastre. »

Samedi 27 juillet. — Un joli mot d’un petit garçon à une grande fillette, affectionnée par lui : « Je t’amoure. »