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Page:Goncourt - Journal, t8, 1895.djvu/99

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verselle. Le compartiment de première est envahi par des Allemands, qui se montrent mal élevés, autant que des Anglais en voyage, avec une note de jovialité peut-être plus blessante. Il y a parmi eux un gros banquier juif, qui ressemble étonnamment à Daikoku, au dieu japonais de la richesse, et dont le ventre semble le sac de riz sur lequel on l’assied — et qui pue des pieds. En face est son fils qui se mouche dans un foulard rose, très semblable à une cravate de maquereau, et qui ronfle ignoblement. Le vieux banquier est accompagné de sa fille, une assez jolie fille, à l’air légèrement cocote, et qui est couchée de côté sur la poitrine de son père, dont la large main l’enveloppe et lui caresse le corps, auquel le mouvement de lacet du chemin de fer donne le mouvement d’un corps de femme qui fait l’amour. Je n’ai jamais rien vu de ma vie d’aussi impudique que ce témoignage public d’amour paternel. Il y a un autre Allemand, genre étudiant, appuyé sur un sac de nuit, grand comme une malle, vêtu d’un pardessus couleur chicorée à la crème, et buvant à même au goulot d’une longue bouteille de vin du Rhin. Et d’autres encore aussi insupportables et qui semblent se sentir déjà dans leur patrie.

Lundi 16 septembre. — Ce soir, un spectacle assez drolatique, rue du Caire. Un ecclésiastique que j’ai devant moi, à la danse du ventre, se met à regarder