Aller au contenu

Page:Goncourt - Outamaro, 1891.djvu/172

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
162
L’ART JAPONAIS

couleur, amène des veinages, des marbrures, des agatisations, comme il s’en rencontre dans les malachites, les turquoises, les pierres dures, et prépare ces dessous si extraordinaires, si adorablement nues, presque changeants, et n’ayant plus, si j’ose le dire, l’immobilité d’une teinte plate, sous le décor, sous la richesse de la broderie d’une robe.

Dans la recherche de l’harmonie générale l’imprimeur va encore plus loin : l’épreuve qu’il tire, il la tache, oui, il y jette des salissures, ressemblant à l’empreinte, qu’aurait pu prendre la planche en couleur dans le frottement d’une planche en noir, encore humide ; mais comme ces salissures ne sont répandues que sur les terrains, les boiseries, qu’elles ne touchent jamais aux visages, aux chairs des femmes, il est incontestable que ces salissures sont l’œuvre de l’imprimeur, sur l’indication du peintre.

Maintenant, qu’on le sache bien, les impressions, sorties de dessous ce tirage d’art, n’étaient pas, comme quelques-uns le disent, des impressions à l’usage du gros public, elles s’adressaient aux amateurs délicats, aux hommes de lettres, vivant autrefois au Japon dans l’intimité des artistes, aux femmes des daimios, et elles demeuraient de luxueuses images, jusqu’au