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Page:Gorki - Contes d Italie.djvu/122

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CONTES D’ITALIE

— Quand je vois cette bouche qui engloutit tout, je me dis que ma force à moi a été dévorée par je ne sais trop quoi, qui lui ressemble. Il me paraît que, tous, nous vivons et nous mourons pour entretenir des parasites.

Et cette tête muette faisait naître chez tout le monde des pensées mornes et des sentiments qui terrifiaient le cœur.

La mère du monstre se taisait, écoutant les propos des voisins. Ses cheveux devinrent très vite blancs, et des rides se dessinèrent sur son visage. Depuis longtemps déjà, elle ne savait plus rire. Les gens n’ignoraient pas qu’elle passait des nuits entières, immobile sur le seuil, à regarder au ciel, comme si elle en attendait du secours. Haussant les épaules, ils se disaient l’un à l’autre :

— Qu’a-t-elle à attendre ?

— Porte-le sur la place, près de la vieille église ! lui conseilla-t-on. Les étrangers s’y promènent ; ils lui jetteront quelquefois des sous de cuivre.

La mère tressaillit, effrayée, et répondit :