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Page:Gorki - Contes d Italie.djvu/261

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LA CONVERSION

s’exprimait en français, langue que je connais très bien.

— Avez-vous remarqué les yeux qu’il a ! disait-elle. C’est un paysan aussi, à coup sûr. Qui sait ? peut-être deviendra-t-il socialiste comme les autres, quand il aura quitté l’uniforme. Et dire qu’avec des yeux pareils ces gens veulent conquérir le monde, réorganiser la vie, nous poursuivre, nous anéantir, tout cela afin de faire triompher une espèce de justice aveugle !

— Ce sont des nigauds, moitié enfants, moitié fauves ! dit le docteur.

— Des fauves, oui ! Mais qu’y a-t-il d’enfantin chez eux ?

— Mais ces rêves d’égalité universelle…

— Pensez donc, je serais l’égale de ce soldat aux yeux bovins, de l’autre qui a une figure d’oiseau, nous tous, vous, elle, moi, nous serions les égaux de ces roturiers… dont nous nous servons pour châtier leurs semblables, des fauves comme eux…

Elle parla longtemps et avec feu ; je l’écoutais en pensant : « Ah ! signora, il en est