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Page:Grégoire - De la littérature des nègres.djvu/144

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j’ai voulu prouver que les uns ne sont pas originairement pires que les autres.

Une erreur presque générale, c’est d’appeler vertueux des individus qui n’ont, si je puis m’exprimer ainsi, qu’une moralité négative. La forme de leur caractère est indéterminée ; incapables de penser et d’agir par eux-mêmes, n’ayant ni le courage de la vertu, ni l’audace du crime, également susceptibles d’impressions louables et coupables, ils n’ont que des idées et des inclinations d’emprunt ; on nomme en eux bonté, douceur ce qui n’est réellement qu’apathie, foiblesse et lâcheté. Ce sont eux qui ont donné lieu à ce proverbe : Il est des gens si bons qu’ils ne valent rien.

Dans le tableau des faits honorables qu’on vient de présenter, on retrouve, au contraire, cette énergie (vis, virtus), qui fait des sacrifices pour pratiquer le bien, obliger les hommes, et agir conformément aux principes de la morale. Cette raison-pratique, qui est le fruit d’une intelligence cultivée, se manifeste encore sous d’autres rapports, quoique chez la plupart des Nègres la civilisation et les arts soient dans l’enfance.