Aller au contenu

Page:Gréville - Suzanne Normis, roman d'un père, 1877.djvu/114

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
108
SUZANNE NORMIS.

suivit : ma belle-mère me tança, je ne sais plus pourquoi ; je conduisis ma fille le long d’un tapis rouge qui m’aveuglait, aux sons ronflants des orgues qui m’assourdissaient, puis je la vis tout à coup séparée de moi, agenouillée auprès d’un homme que je trouvai affreux : bien coiffé, frisé, rasé de frais, luisant de cosmétique, roide dans son linge empesé, brillant dans son habit noir, irréprochable, et nul comme un zéro : c’était mon gendre.

Il était parfaitement correct : toute sa toilette venait de chez les premiers fournisseurs, sa tenue était celle d’un homme du monde, et pourtant il avait un air que je déteste par-dessus tout : il avait l’air d’un marié ! Mais, après tout, il y a des gens qui naissent avec cet air-là, et d’ailleurs je ne pouvais faire autrement que de le trouver intolérable : n’était-ce pas mon gendre ? Je jetai un regard à ma belle-mère, qui me répondit de même. Nous nous comprimes, et je lui pardonnai bien des choses ; en ce moment-là elle le détestait tout comme moi.

Le jour s’écoula ; ces journées-là finissent aussi ; on déjeuna chez moi, et, à cinq heures, les époux prirent l’express. Ils allaient passer la lune de miel au château de Lincy, où je devais