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Page:Groslier - À l’ombre d’Angkor, 1916.djvu/18

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I

6 juin 1913.

C’est, à cette époque des basses eaux, la grande poésie du fleuve avec ses rives escarpées, coupées à pic dans une terre rouge comme de la chair. Tous les arbres y poussent vigoureusement : le teck aux larges feuilles vert tendre, les palmiers à sucre et leurs boules de palmes, les bambous semblables à des jaillissements d’eau verte, grêles dans le bas et qui retombent après un épanouissement délicat, d’immenses banians abritant les pagodes, les manguiers noirs — et puis, de grands cadavres d’arbres aux blancheurs d’ossements. Leurs branches tordues font des gestes désespérés à l’eau qui passe. Mais, comme en ce pays rien n’est complètement mort ou tout à fait triste, des lianes fastueuses empanachent ces squelettes.