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Page:Groslier - À l’ombre d’Angkor, 1916.djvu/185

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gardiens de troupeaux attardés. Ne sommes-nous pas sur une route habituelle, peu éloignée d’un village ? Ces bergers presque nus et n’attendant pas de mystère, passeraient dans la grande indifférence de leur race. Mais moi, au bruit des grelots et à leur passage fantomatique, quelles impressions profondes ne ressentirais-je pas ! Et mes regards ne chercheraient-ils pas au devant le guide lumineux ?

Ce qui arriva fut bien plus beau. Et vraiment, si les circonstances les plus fortuites et les plus naturelles peuvent prendre selon leur succession, le hasard, les coïncidences et l’état d’âme avec lequel on s’y mêle, de telles couleurs et de telles significations, je comprends en cette heure toutes les causes de l’inspiration et pourquoi le poète voit une légende au lieu des réalités.

Au point d’où la piste des charrettes sortait des arbres apparurent soudain des lueurs de torches. Et voici que de l’ombre où je veillais, je distinguai bientôt trois bonzes — trois ! Leurs grandes draperies jaunes, imprécises dans les lumières mouvantes, semblaient pailletées d’or. Ils étaient chargés d’objets indistincts, tels Balthazar, Melchior