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Page:Haeckel - Religion et Évolution, trad. Bos, 1907.djvu/144

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convaincre lui-même qu’elles ne se soutiennent pas. C’est chose connue qu’il est impossible, même à la logique la plus claire et la plus subtile, d’en avoir jamais fini avec un Jésuite intelligent ; car il se sert avec habileté des faits eux-mêmes, et en les retournant et les défigurant, il transforme la vérité en son contraire. C’est d’ailleurs tout à fait peine inutile de vouloir convaincre un adversaire par des arguments rationnels, quand il est convaincu que la croyance religieuse « est au-dessus de la raison tout entière ». Le point de vue de Wasmann est nettement caractérisé par la Considération finale du onzième chapitre de son livre sur La biologie moderne et la théorie de l’évolution (p. 307) : « Entre la science naturelle et la révélation surnaturelle, il ne peut jamais y avoir de réelle contradiction car elles tirent toutes deux leur origine du même esprit divin. » Cette affirmation est merveilleusement illustrée par la lutte continuelle que la « Science naturelle » est sans cesse obligée de soutenir contre la croyance à la « révélation surnaturelle », lutte qui se fait jour partout dans la littérature philosophique et théosophique, en particulier depuis un demi-siècle.

Le point de vue orthodoxe de Wasmann nous devient surtout clair par l’aveu suivant : « La théorie de l’évolution, que je défends en tant que naturaliste et philosophe, repose sur les fondements de la conception chrétienne, que je considère comme la seule juste : Au commencement Dieu créa le ciel et la terre. » Malheureusement Wasmann n’a pas dit comment il se représentait cette « création tirée du néant », ni ce qu’il entendait par Dieu et par Ciel. Pour l’éclairer là-dessus on peut lui recommander l’excellent livre de Troels-Lund : Tableau du Ciel et Conception de l’Univers.

Presque à la même époque où je faisais à Berlin mes Conférences darwinistes, Wasmann illustrait son livre par des conférences bien jésuitiques (faites à Lucerne les 11 et 12 avril dans la grande salle de l’école cantonale). La Patrie, journal ultramontain de Lucerne (nos 88, 90, 92), voit dans ces conférences « une action libératrice et un facteur décisif dans le combat des esprits ». La phrase suivante est relevée : « Au stade le plus élevé de la philosophie évolutionniste et théiste trône Dieu, le tout puissant créateur du ciel et de la terre ; tout de suite après lui, créée par lui, l’âme humaine immortelle. Nous atteignons à ces notions, non seulement par la foi, mais encore par la voie inductive,