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Page:Haeckel - Religion et Évolution, trad. Bos, 1907.djvu/33

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de cela cinquante ans, si différente des vues qui prévalent aujourd’hui qu’il est difficile d’en donner une idée nette à un jeune naturaliste philosophe. Le grand problème de la création, la question de savoir comment les diverses espèces animales et végétales sont apparues, d’où l’homme provient, n’existaient pas pour la science exacte ; il n’en était pas question.

Alexandre de Humboldt fit, ici même, il y a de cela soixante-dix-sept ans, une série de conférences dont devait sortir son livre célèbre : « Cosmos, principes de la description physique du monde ». Lorsqu’il effleura en passant l’obscur problème de l’apparition des êtres organiques sur notre planète, il se contenta de cette remarque résignée : « Ce n’est pas dans le domaine empirique de l’observation objective, dans la description du devenu, que doivent rentrer les problèmes mystérieux et non résolus encore du devenir » (t. I, p. 367). Il est curieux de constater que Jean Müller le plus grand biologiste allemand du xixe siècle, déclare encore en 1852, dans sa brochure célèbre sur « la production des gastéropodes à l’intérieur du corps des Holothuries » : « L’apparition d’espèces animales diverses est incontestable, c’est même un fait confirmé par la paléontologie, mais il reste surnaturel tant que cette apparition ne se laisse pas ramener à des actes du devenir et qu’elle ne saurait faire l’objet d’une observation. » J’ai eu moi-même, pendant l’été de 1854, plusieurs entretiens remarquables avec Jean Müller, celui de tous mes maîtres célèbres dont je fais le plus de cas. Ses conférences de physiologie et d’anatomie comparée — les plus brillantes et les plus sug-