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Page:Haeckel - Religion et Évolution, trad. Bos, 1907.djvu/41

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peu fou, produisait une vive sensation et que ce livre jetait par dessus bord toutes les théories jusqu’alors proposées au sujet de l’origine des espèces.

Je constatai bientôt que presque tous les savants berlinois s’accordaient à repousser le darwinisme ; à leur tête étaient le célèbre microscopiste Ehrenberg et l’anatomiste Reichert, le zoologiste Peters et le géologue Beyrich. Le brillant orateur de l’Académie de Berlin, Émile du Bois-Reymond hésitait ; il reconnaissait, d’une part, que la théorie de la descendance était la seule solution naturelle de l’énigme de la création ; d’autre part, il en regardait railleusement le développement comme un mauvais roman et pensait que les recherches phylogénétiques sur la communauté d’origine des diverses espèces avaient à peu près la même valeur que les rêveries des philologues sur l’arbre généalogique des héros homériques. Isolé, l’excellent botaniste Alex. Braun, faisait exception par son adhésion entière et chaleureuse à la théorie de la descendance. C’est près de ce maître cher, pour qui j’avais le plus grand respect, que je trouvai une consolation et des encouragements, après que la première lecture de l’œuvre de Darwin m’eût profondément impressionné et, bientôt, complètement gagné au transformisme ; je trouvais, en effet, dans la conception darwiniste de la nature, grandiose et unifiée, dans son argumentation convaincante en faveur de l’évolutionnisme, la solution de tous les doutes qui m’avaient assailli depuis le début de mes études biologiques.

Dans cette grande bataille des esprits, mon célèbre maître R. Virchow joua un rôle remarquable ; je l’avais connu en 1852 à Würzbourg et j’avais bientôt noué avec