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Page:Haraucourt - La Peur, 1907.djvu/219

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LA BOMBE

C’est des mots, tout ça, des mots, et les mots sont faciles à dire ! « La charité chrétienne, la pitié, rendre le bien pour le mal, pardonner les offenses… » On lit ça dans les Évangiles, mais Notre-Seigneur était Dieu, et moi je suis un homme, un homme, vous entendez ? Il y a des choses qu’on ne pardonne jamais parce qu’on ne peut pas, et on ne peut pas parce qu’on est un homme. On dira bien, au confessionnal, qu’on les a effacées, et peut-être même on croira que c’est vrai, pendant une demi-minute, le temps de battre sa coulpe ou de recevoir la communion. Mais quand on rentre dans la vie, au diable la promesse qu’on avait faite à Dieu ! On ne peut pas, et, dès qu’on repense à la chose, elle vous tourne le sang : il n’y a pas de serment qui tienne contre le sang qui tourne !