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Page:Harvey - Les demi-civilisés, 1934.djvu/225

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les demi-civilisés

plus vite ! Je l’entends derrière nous, qui nous poursuit…

— Ne crains rien, tu es chez moi. Tu ne vois donc pas. Tiens, regarde ton portrait sur la cheminée.

— Mon portrait ?… Non, c’est une grande plaine toute remplie de soldats de neige… Ils m’appellent tous par mon nom. Il en est un, là, un bonhomme de neige pareil à ceux que je sculptais dans le jardin de mon père, quand j’étais petite. Il me dit qu’il va m’enlever dans une bourrasque et me porter dans les hauteurs du monde… Oh ! c’est affreux ! Sa poitrine vient d’être ouverte comme par une lance invisible, et il en sort du sang…

— Deux grandes armées avec une multitude de soldats de neige… Deux généraux transparents comme des blocs de glace… Tous ces hommes blancs se battent… Ils saignent et tombent. Ils se relèvent… La troupe entière monte dans l’air, à l’assaut d’une montagne de lumière. Les deux chefs, marchant en tête et se tenant par la main, vont s’embrasser au bord du soleil…

Comme ils sont beaux les soldats de neige !

— Dorothée ! ne te fatigue pas ! ne parle plus ! Tu me fais mal.

— Non, ce n’est pas triste, c’est si grand… Tu ne trouves pas, Max ?… Quatre francs-tireurs énormes portent, à bout de bras, une femme qu’ils emmènent avec eux… Que dites-vous, francs-tireurs ? Que c’est