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Page:Helvétius - Œuvres complètes d’Helvétius, tome 13.djvu/115

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Pour les tenir soumis à son dur esclavage,
De la raison en eux il proscrivit l’usage,
Voulut que, dédaignant son impuissant appui,
Ils ne pussent jamais être instruits que par lui.
La terre en ce moment se couvrit de ténebres ;
Le Fanatisme, né sur des tombes funebres,
Dans le temple des dieux par l’Erreur allaité,
Y reçut les respects de la Crédulité :
Le sceptre est dans ses mains un don de l’Ignorance ;
Sur l’univers craintif il étend sa puissance :
Sa tête est dans les cieux, son pied touche aux enfers,
L’empyrée est son dais, son trône est l’univers.
Captif d’autant plus sûr que moins il pense l’être,
Ce monde se croit libre en l’adoptant pour maître.
Il marche environné de folles visions ;
Sur son front est écrit Prince des Nations.
À Lisbonne, à Goa, c’est son pouvoir qui tonne,
Qui forme, qui détruit, qui punit, qui pardonne.
On le vit autrefois au rivage africain
Enfermer sa victime en un brûlant airain,
Du couteau de Calchas frapper Iphigénie,
Enterrer la vestale aux champs de l’Ausonie,
Du vertueux Socrate ordonner le trépas,
Porter par-tout la crainte, armer tous les états.