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Page:Henriet - Le paysagiste aux champs, 1876.djvu/247

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LE PAYSAGISTE AUX CHAMPS.


d’un parterre en belle humeur. Le musicien, lui aussi, s’élance en plein idéal sous l’œil froid d’un public réfractaire à l’émotion. Il y a là une dissonance de diapason, un écart de température qui font le musicien ridicule quand il n’a pas la puissance de communiquer à ceux qui l’écoutent un peu de sa chaleur et de sa folie.

Le peintre a sur eux l’avantage de créer dans le silence de l’atelier, d’être rentré en possession de son sang-froid quand il se trouve en contact avec les étrangers, et de pouvoir exercer sur lui-même ses facultés critiques, — ressource qui manque absolument au comédien et au musicien, dont la création éphémère ne survit pas au moment de fièvre qui l’a inspirée.

Le peintre, habitué à une vie solitaire, a souvent une timidité qui lui tient lieu de modestie. Le musicien et l’acteur, qui vivent en public, contractent un aplomb formidable et leur vanité se complique souvent de mauvais goût. Quelquefois, il est vrai, l’isolement de l’atelier engendre, chez certains peintres plus ou moins méconnus, une vanité d’un caractère particulier, ombrageuse, concentrée, féroce. Pour être d’une nature différente, celle-ci ne le cède en rien alors à la vanité de l’artiste