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Page:Hess - L’Âme nègre, 1898.djvu/116

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MAJOGBÉ.

Chango n’épargnait pas le protecteur de ses prêtres ; la demeure sacrée disparaissait dans un immense feu de vengeance, dont les flammes atteignaient le ciel, éclairant la ville et l’horizon, flammes rouges, flammes sanglantes, flammes de mort…

Tout ce peuple en fureur, toutes ces femmes, tous ces hommes lancés par Elado sur une victime, se turent… Il y eut un moment de stupeur et d’épouvante… on ne comprenait pas…

Maté voulut s’enfuir. Une main s’abattit sur son épaule. Majogbé était devant lui, et d’une voix forte criait :

— Gens d’Aké, regardez. Maté doit mourir… Maté est mort !

Un coup de sabre, et la tête du vieux prêtre vola pendant que le corps s’abattait dans un flot rouge sur le sable.

— Gens d’Aké, les dieux réclament encore une victime… Allez piller ce qui reste des richesses d’Elado, Elado est mort ! Le Juste est vengé, Kosioko a enfin un beau sacrifice !

Elado venait aussi de tomber, sans tête.

Des guerriers se précipitèrent ; ils roulèrent, la figure fracassée. Majogbé se servait du petit fusil des blancs. Il bondit. La foule s’ouvrit effrayée. Lorsque des hommes plus courageux s’élancèrent à sa poursuite, il avait de l’avance. Du haut des rochers sacrés, il lançait deux têtes dans le bois des suppliciés…

Il regarda une dernière fois la ville. Tout le quar-