Aller au contenu

Page:Hilaire Le Gai (Gratet-Duplessis) Un million d’énigmes, charades et logogriphes.djvu/374

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

 
Chaque homme l’a dans son jeune âge ;
Heureux qui peut le conserver !


549. Énigme.

Je suis une ombre, un souffle, un rien ; me définir
Ne parait donc pas chose aisée.
L’existence, lecteur, m’est même refusée.
Toujours on me poursuit sans pouvoir m’obtenir.
Quel mortel cependant sait braver mon prestige ?
Qui, mille fois joué, trompé,
De moi ne se vit pas plus ou moins occupé ?
Je tourmente, je plais : je console, j’afflige ;
Je rassure, j’effraye : et, vrai caméléon,
Des sujets où j’agis les traits, l’impression,
Rendent à l’infini ma couleur variable.
Chez un peuple entier, dit la fable,
Un monstre qui porta mon nom
Répandit la terreur, la désolation ;
Aussi fais-je trembler la crainte, la faiblesse.
Mais les cœurs, les esprits de plus heureuse espèce
Me trouvent des attraits ; dans leur illusion,
Ils m’appellent souvent sirène enchanteresse.
Grâce à mon charme, ils sont bercés par les amours,
Par la fortune, par la gloire
Puisses-tu, cher lecteur, comme eux, me voir toujours
Couleur de rose et jamais noire !