Après que Maugis fut parti, Regnaut appela ses
frères et leur dit : Dites-moi ce que nous ferons du
roi que nous tenons en nos mains ? vous savez qu’il
nous a long-temps endommagés et fait plusieurs
maux ; ainsi il me semble que nous devons nous
venger de lui, puisque nous le tenons. Sire, dit
Richard, je ne sais ce que vous ferez ; mais si vous
m’en croyez, il serait, bientôt pendu, car je crois
qu’après sa mort personne en France n’oserait nous
attaquer. Regnaut baissa le tête et se mit à méditer
en lui-même sérieusement. Richard le voyant
ainsi, lui dit : À quoi pensez-vous ? est-ce à qui en
fera l’office ? je le ferai et dès-à-présent si vous
voulez me délivrer. Regnaut leva la tête et dit :
mes frères, vous savez que le roi est notre souverain
seigneur ; et d’ailleurs vous voyez comme Roland,
le duc Naimes, Oger, l’archevêque Turpin
et Eston sont ici pour faire notre appointement ; ils
connaissent bien que nous avons le droit, et conséquemment
si nous le tuons à droit ou tort, chacun
nous en voudra, et tant que nous vivrons, nous aurons
guerre. Allard lui dit alors : Frère, vous parlez
avec prudence, mais si nous ne pouvons avoir la
paix avec lui, il me semble que nous devons la lui