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Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome I.djvu/406

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ODES ET BALLADES.

Tityre était absent ; ces ruisseaux, ce zéphyre,
Tout aux échos plaintifs redemandait Tityre.

Tityre.

Que faire ? Il me fallait, sous un joug odieux,
Du monde et des romains méconnaître les dieux…
Enfin je vis César !… oui, douze fois l’année,
Son autel entendra notre hymme fortunée !…
Quand j’élevai ma voix au pied de ce héros :
Pasteur, dit-il, allez, accouplez vos taureaux.

Mélibée

Que ton sort à mon cœur paraît digne d’envie
Vieillard ; dans ces vallons tu vas couler ta vie…
Ces marais sablonneux, fécondes par tes soins,
Sauront toujours, hélas ! suffire à tes besoins ;
Tes brebis n’iront pas sur des rives lointaines
Empoisonner leurs fruits par des vapeurs malsaines,
Heureux vieillard ! assis à l’ombre des forêts,
Au bruit de ces ruisseaux tu goûteras le frais ;
Tandis qu’autour de toi l’abeille murmurante
Picotera des fleurs la corolle odorante,
Auprès de ces buissons, lassé de tes travaux,
Souvent d’un doux sommeil tu boiras les pavots,
Sous ces ormes touffus, tes colombes chéries
Charmeront de leurs chants les bois et les prairies,
Et le jeune ramier s’élevant dans les airs
Éveillera l’écho du bruit de ses concerts.

Tityre.

Aussi le Tigre ira baigner la Germanie,
Le Nil verra ses eaux féconder l’Ausonic,
Le cerf s’élèvera dans l’empire des airs,
Le soleil de ses feux desséchera les mers,
Avant que de César la bienfaisante image
Cesse de recevoir mes vœux et mon hommage.

Mélibée

Au bord où l’Oasis roule ses flots fougueux,
Vers les climats glacés des scythes belliqueux,