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Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 1, 1788.djvu/122

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Essais.

Mais cette vérité ne nous paroît pas aussi évidente au premier coup-d’œil, lorsqu’il s’agit d’événemens avec lesquels nous sommes familiarisés depuis notre naissance, qui se rapportent étroitement au cours ordinaire de la Nature, & que nous supposons dépendre des qualités simples des objets, sans tenir à la structure intérieure de leurs parties : nous sommes enclins à nous croire capables de découvrir ces effets par le simple usage de la raison, sans réclamer le secours de l’expérience ; nous nous faisons même illusion jusqu’à croire, que quand à l’heure qu’il est nous ne serions que paroître dans ce monde, nous pourrions pourtant juger, du premier coup, qu’une bille, étant poussée contre une autre, la mettroit en mouvement, prononcer là-dessus avec certitude, sans avoir besoin d’attendre l’événement. Telle est l’influence de la coutume ; en exerçant l’empire le plus despotique, elle nous déguise notre ignorance naturelle, que dis-je ? elle se cache à elle-même,& paroît ne prendre aucune part aux choses, précisément parce qu’elle y domine au plus haut degré.