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Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 1, 1788.djvu/400

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Essais.

tion humaine est naturellement portée au sublime : elle se plaît dans les choses placées à une grande distance, & qui sont extraordinaires : sans se laisser arrêter, elle prend son essor vers les parties du tems de l’espace les plus éloignées, afin de se soustraire aux objets que l’habitude lui a rendus trop familiers. L’homme qui s’est fait un jugement sain, suit une méthode toute contraire. Il laisse là toutes les recherches trop élevées & tirées de trop loin ; il se renferme dans la vie commune, dans des sujets utiles pour la pratique, & que l’expérience journalière lui offre ; il abandonne tout ce qui est plus sublime à l’art des poëtes& & des orateurs, ou aux artifices des prêtres & des politiques. Rien ne peut contribuer davantage à nous inspirer une aussi salutaire résolution, que de nous convaincre entiérement de la force du doute pyrrhonien, & de l’impossibilité d’en être délivré par une autre voie que par la puissante influence de l’instinct naturel. Cela n’empêchera pas ceux qui ont du penchant pour la philosophie, de poursuivre leurs recherches : outre qu’il y a un plaisir