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Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 1, 1788.djvu/59

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Philosophiques.

qui n’entre pour rien dans les actions & dans les affaires de la vie, disparoît aussi-tôt que le philosophe, quittant ses ténèbres, vient se montrer au grand jour : il est rare que ses préceptes aient de l’influence sur notre conduite & sur nos mœurs : la vivacité de nos sentimens, la force de nos affections, le désordre de nos passions, dissipent d’abord toutes les idées qui doivent leur origine à des conséquences philosophiques, & font rentrer, dans la foule du vulgaire, le philosophe le plus profond.

Il faut avouer encore que la philosophie, qu’on peut nommer pratique, a procuré à ceux qui s’y sont distingués la renommée la plus durable aussi bien que la plus juste. Les raisonneurs abstraits paroissent n’avoir joui jusqu’ici que de réputations momentanées fruits de caprice ou de l’ignorance de leur siecle ; ils n’ont pu soutenir le jugement plus équitable de la postérité. Il arrive aisément à un esprit profond de s’égarer dans la subtilité de ses raisonnemens : & comme aucune conclusion n’est capable de l’effrayer, ni par sa nouveauté, ni par son contraste avec les