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Page:Huysmans - A Rebours, Crès, 1922.djvu/146

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rongées par des syphilis et des lèpres, tendaient des chairs livides, marbrées de roséoles, damassées de dartres ; d’autres avaient le ton rose vif des cicatrices qui se ferment ou la teinte brune des croûtes qui se forment ; d’autres étaient bouillonnées par des cautères, soulevées par des brûlures ; d’autres encore, montraient des épidermes poilus, creusés par des ulcères et repoussés par des chancres ; quelques-unes, enfin, paraissaient couvertes de pansements, plaquées d’axonge noire mercurielle, d’onguents verts de belladone, piquées de grains de poussière, par les micas jaunes de la poudre d’iodoforme.

Réunies entre elles, ces fleurs éclatèrent devant des Esseintes, plus monstrueuses que lorsqu’il les avait surprises, confondues avec d’autres, ainsi que dans un hôpital, parmi les salles vitrées des serres.

— Sapristi ! fit-il enthousiasmé.

Une nouvelle plante, d’un modèle similaire à celui des Caladiums, l’« Alocasia Metallica », l’exalta encore. Celle-là était enduite d’une couche de vert bronze sur laquelle glissaient des reflets d’argent ; elle était le chef-d’œuvre du factice ; on eût dit d’un morceau de tuyau de poêle, découpé en fer de pique, par un fumiste.

Les hommes débarquèrent ensuite des touffes de feuilles, losangées, vert-bouteille ; au milieu s’élevait une baguette au bout de laquelle tremblotait un grand as de cœur, aussi vernissé qu’un piment ; comme pour