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Page:Huysmans - Certains, 1908.djvu/132

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CERTAINS

domine une illusoire Notre-Dame, charrie des gestes de défi, des hurlements et des blasphèmes, des agonies aux membres révulsés, aux cheveux droits.

Telle est, notarialement exposée, l’ordonnance de cette gravure. D’ensemble extraordinaire, car elle bouillonne en quelque sorte avec son brouhaha et son grouillement de foule, cette rare estampe, parcellée en chacun de ses nombreux groupes, stupéfie par l’alerte des mouvements, par l’expansion des physionomies dont les passions excédées s’effarent, tantôt héroïques, tantôt triviales. C’est tout à la fois intime et féroce ; hollandais, bonhomme par le détail scrupuleux et juste ; calviniste enragé, génevois, par la cruauté religieuse et froide.

Tout ce que cet homme pouvait avoir de pitié dans l’âme, il l’a certainement mise dans son œuvre, mais sous cette pitié puritaine, comme rentrée, sourdent des sursauts de rage ; ennemi par son tempérament même des pompes supplicières du Saint-Siège, il a dénudé en d’horribles procès-verbaux, recuit et condensé en d’âpres scènes les studieuses tortures que la férocité théâtrale des catholiques infligeait à ces