Aller au contenu

Page:Huysmans - Sainte Lydwine de Schiedam (1912).djvu/126

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tifier, autant que cela dépendrait d’elle, des mérites acquis par ses longues souffrances ; elle y mit cette seule condition que la mourante se résignerait à quitter la vie et s’abandonnerait en toute confiance à l’indulgente tendresse du Juge.

Pétronille, qui savait de quelles prébendes de grâces son enfant était pourvue, se rassura et s’éteignit en paix ; mais Lydwine, persuadée qu’elle ne possédait plus rien, puisqu’elle avait tout cédé à sa mère, se hâta de remédier à son dénuement. Elle vendit les meubles et les nippes dont elle pouvait se passer et en distribua l’argent aux pauvres ; puis elle s’avisa que son lit était trop doux et elle s’en débarrassa au profit de son neveu et de sa nièce qui s’installèrent en qualité de garde-malade, auprès d’elle ; elle commanda ensuite que l’on étendît, sur le sol humide de la chambre, une planche ôtée au flanc d’un tonneau et qu’on la recouvrît de paille ; et cette paille qui bientôt se convertit en un abominable fumier fut désormais sa seule couche ; mais il fallut l’y transporter et, malgré les précautions dont on usa, ce fut horrible. On dut la ficeler pour qu’elle ne se séparât point et, en la soulevant, l’on ne put faire autrement que d’arracher les chairs collées au drap.

Elle estima que ce n’était pas encore assez et elle se procura, afin de râper la peau de ses reins à vif, une ceinture en crins de cheval qu’elle ne retira plus.

Elle avait alors vingt-huit ans ; l’hiver commençait, un hiver si long et si rigoureux que les vieillards ne se souvenaient pas d’en avoir jamais enduré un pareil ;