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Page:Ingres d’après une correspondance inédite, éd. d’Agen, 1909.djvu/202

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XXII
Paris, ce 19 février 1827.

Mon bien cher, tu ne peux savoir combien tes reproches mont fait de mal, parce qu’ils sont eu quelque sorte mérités ; pas dans le fond, mais dans la forme. Je rougis de ma détestable négligence, puisqu’elle m’occasionne un blâme sur des sentiments dont ceux qui me connaissent bien ne douteront jamais. J’espère en toi, Signor avvocato, car c’est ici l’occasion de faire ton métier et pour ton ami. Je ne doute pas de ton succès pour me ramener tous mes amis et leur exprimer combien je suis et je serai toute ma vie touché, de tendre reconnaissance pour les mille et une bontés qu’ils ont eues envers moi e al de sopra del mio merito.

J’ai écrit a M. de Gironde, à M. Teulières, à mon frère, à l’Académie. Mais, mon ami, quelle vie je mène ici ! Vie délicieuse, il est vrai, puisque c’est celle de l’étude. Je vis claquemuré dans mon atelier, tous les jours, depuis neuf heures jusqu’à six où je vais prendre mon repas, me reposer un peu et reprendre mon travail préparatoire pour le lendemain quand, par bonheur, les tyranniques usages [du monde me le permettent. Car ce jour de l’an et ce carnaval m’ont encore assommé de dîners, soirées, visites, etc., etc. Je vis avec la nature et les modèles les plus beaux, qui me révèlent les beautés classiques de Phidias et de Raphaël et m’assurent encore bien plus, s’il est possible,