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Page:Ingres d’après une correspondance inédite, éd. d’Agen, 1909.djvu/203

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dans mes croyances, doctrine et foi dont nous avons tant parlé.

Mon bien cher, tu sauras, que, dès mon arrivée, j’ai mis la main à une esquisse arrêtée et coloriée de notre Homère. Il n’est personne qui l’ait vue et qui m’en dise merveille, (j’ose te le rapporter, mais entre nous). M. de Forbin en a parlé el en parle dans tous les salons et on en espère tout, dit-on. Moi, franchement, j’en espère aussi et suis bien monté. Mes études très avancées ont tout confirmé et sanctionné, toutes les idées que vous connaissez y sont et rendues avec leur accent. Sois tranquille : ton Racine y est et occupe une belle place, et sur la même ligne que Corneille ; mais toujours à mon corps défendant. Je suis donc bien moins de ton avis, pour les raisons que tu me donnes encore. Sache que je suis tout à fait dans l’antiquité et archi-antique plus que jamais, et que toute comparaison modernique me parait un blasphème. Plus il est Racine, plus il est coupable à mes yeux. Je ne puis admettre ni comprendre ta fleur de poésie. Quelles grâces, quels styles, quels modes n’ont pas été familiers aux Anciens ? Pour ton autre blasphémateur et indigne Voltaire, en matière de goût et de haute poésie, je l’admire seulement. Dans d’autres genres, je le laisse se battre avec Racine et peu m’importe. Tout ceci sans rancune, mon cher ami. D’accord au fond et sur tant de choses, il n’est pas étonnant que nous différions sur un point qui m’étonne cependant, parce que ce point est lié à un fond et à un tact que je te