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Page:Ingres d’après une correspondance inédite, éd. d’Agen, 1909.djvu/98

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que je voie le monde. Je suis obligé de m’arracher de mon atelier pour des visites de curieux. Faire une toilette est pour moi un des travaux d’Hercule. J’aurais voulu être ici inconnu, ne m’occupant exclusivement que des tableaux d’histoire et ne point me sacrifier à de petits ouvrages, qui prennent plus de temps que les grands. J’aurais voulu surtout n’être vivant que dans mon atelier. La vie studieuse est la plus heureuse ; elle fait tout oublier du dégoûtant de ce monde. Je veux entreprendre de m’isoler, et puis surprendre et frapper fort.

Pour surcroît de fâcheux incidents, ta dernière lettre est restée prisonnière à la poste. J’ai eu l’inspiration de l’y réclamer ; sans cela, elle y serait encore. Je tremble que tu ne sois à Paris. J’espère que le tableau est arrivé, et en bon état. Tout bien pesé, il peut recevoir un peu de vernis. Prie M. Debia de nous rendre ce service. Je suis enchanté d’être son confrère en art et son compatriote, et je fais des vœux sincères pour qu’il soit remarqué au Salon.

Quant à notre épée d’Henri IV, tu ne dois pas tarder à m’en écrire. Je te prie de ne rien forcer pour son acquisition. S’il n’allait point à genio y ce qui arrive tous les jours, cher ami ! L’argent est à toi, à ta disposition. Viens à Paris ; ou mieux, viens revoir ton vieil ami à Florence. Je puis, sans me gêner, t’offrir une chambre fort agréable. Tu partageras notre petit ordinaire, Avec le peu que te fait ton père, ou point même,