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Page:Ingres d’après une correspondance inédite, éd. d’Agen, 1909.djvu/97

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les mois et, au total, je n’en suis pas fâché ; C’est t’en dire assez. Comme je suis malheureux de manquer l’occasion de te revoir, ce dont je me faisais une si chère fête ! Car j’étais bien décidé à aller à Montauban, sinon te voir à Paris.

Tout ce qui va se passer au Salon, où je devrais certainement jouer un rôle intéressant, me perce le cœur de regrets. Je viens d’en écrire à M. de Forbin pour le prier de ne rien recevoir de moi au Salon, puisque je ne puis qu’apporter le tableau de Montauban, (le Vœu de Louis XIII, commandé par l’État). Il ne faut cependant pas jeter le manche après la cognée. J’attends donc de ton amitié, non des reproches, mais des consolations et du courage pour remettre nos projets à deux ans. Ils passeront vite, car je serai fort occupé et, par conséquent, j’aurai moins de beaux et grands ouvrages à opposer. Je t’en ferai, plus tard, rémunération. Ne crois pas que j’aie été sans m’occuper du grand tableau dont j’ai déjà fait un très grand tiers. J’espère prouver qu’il n’y a pas de sujets indifférents en peinture ; le tout est de bien voir, et juste surtout.

Dieu merci ! Je peux avec toi penser tout haut. Je me trouverais trop heureux si les moyens légitimes pour se faire un nom n’avaient la puissance d’ameuter l’envie et l’ignorance de ce siècle contre un honnête artiste. Je me sens dans la force du talent, je me vois de la facilité à produire. Une chose est ennemie de mon repos ; je ne suis point un homme de société, et on veut