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Page:Ivoi - L’Aéroplane fantôme.djvu/183

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L’AÉROPLANE-FANTÔME

Ces mots murmurés fusent entre les lèvres impériales, au-dessus desquelles la moustache se hérisse en crocs.

Et seul démasqué dans l’assistance, le Maître de l’Empire promène autour de lui son regard inquisiteur, aux reflets d’acier, comme si les masques qui passent en saluant très bas, allaient lui donner le mot de l’énigme.

Mais la cohue, adulatrice même dans le silence, défile toujours.

— Qu’est cela !

La question jaillit. En dépit de l’étiquette, tous l’ont prononcée à la fois.

C’est qu’une femme vient d’apparaître, masquée comme tous les assistants, mais, de plus, la tête voilée d’une écharpe épaisse qui cache la chevelure, le corps dissimulé sous un ample manteau, flottant ainsi qu’un domino lâche !

Ah ! ah ! celle-ci a mis en défaut la perspicacité du monarque. Aucun détail de sa toilette n’est perceptible sous le manteau.

Dans l’entourage de l’Empereur, les visages deviennent impassibles (il serait trop dangereux de rire de la déconvenue du souverain), mais les yeux ont des pétillements qui trahissent la gaieté refrénée à grand peine.

Lui, il a froncé les sourcils. On sent qu’il cherche à percer l’incognito de la personne si bien déguisée.

Elle passe, se courbe si bas qu’elle semble esquisser une génuflexion. Les plus proches de Sa Majesté ont l’impression que l’inconnue a déposé un papier aux pieds de l’Empereur. D’un geste instinctif, tous se penchent en avant.

Ils ne se sont pas trompés. Devant le trône d’argent, une large enveloppe gît à terre, et l’on peut lire, en caractères énormes, cette suscription :

À Sa Majesté Impériale et Royale.

Tous reportent les yeux sur la mystérieuse correspondante. Elle a disparu. Elle a profité du moment d’inattention pour se perdre dans la foule. Un lourd silence plane. C’est l’Empereur qui le rompt.

— Puisque l’on m’intrigue, voyons ce que l’on m’écrit.

Un officier de service se précipite, ramasse l’enveloppe et, la main droite appliquée au rebord du casque, les talons réunis, il la présente au souverain.

Celui-ci la saisit d’une main impatiente. Dans sa hâte qu’il ne cherche pas à dissimuler, il déchire l’enveloppe si mystérieusement parvenue à