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Page:Ivoi - L’Aéroplane fantôme.djvu/392

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L’AÉROPLANE-FANTÔME

pas douter. François vivant, rien d’impossible à ce qu’il eût appris la destination du Fraulein ; un navire est un complice que l’on ne dissimule pas aisément.

Certes, sur la rivière souterraine, dont le défunt avait déjà signalé l’existence dans sa lettre précédente, on dépisterait l’ingénieur. Les aéroplanes ne peuvent rien dans un tunnel ; il fallait d’ailleurs en posséder le plan… Mais l’homme restait à craindre, tandis que le canot du steamer transporterait Von Karch, ses prisonniers, les bandits à sa solde, du Fraulein à l’embouchure du mystérieux cours d’eau.

À cette heure peut-être, au plus haut du ciel, l’aéroplane surveillait le navire. Soudain, Von Karch se frappa le front.

— Il s’agirait de profiter de la nuit ; la nuit est favorable à qui se cache ! Attendre encore un jour, avec l’angoisse de l’ennemi invisible ; non, cela je ne le puis pas.

Il donna un coup violent sur la table.

— Parbleu ! continua-t-il répondant à une pensée intérieure, cela le distrairait… personne ne songerait à surveiller la lagune.

Il se prit à rire.

— Arrive, mon ami Manuelito, je vais envoyer quelques hommes à terre, une idée amusante qui m’est venue. Promène-toi ou dors ; car nous gagnerons la rivière cette nuit même. Brumsen ne t’a pas menti ; tu as aujourd’hui gagné la vie de plaisirs que tu rêves.

Et, suivi par le jeune homme, il remonta sur le pont.

Le pseudo Manuelito, qui ne le quittait pas de l’œil, le vit entraîner à l’écart quelques hommes que le gamin se souvint avoir vus à bord de la Luisa : Siemens, Pétunig, Stolz, Lorike, Fritzeü, et leur parler avec animation.

Après quoi, ceux-ci se dispersèrent pour se rassembler bientôt à la coupée chargés de paquets de dimensions respectables.

Un canot fut mis à la mer. Les coquins y descendirent et l’embarcation déborda s’éloignant dans la direction du port, dont les lumières dessinaient le pourtour.

Von Karch la regarda jusqu’à ce qu’elle eût disparu dans l’obscurité, puis il appela du geste les drôles demeurés sur le navire. Le faux métis, accoudé sur le bastingage d’avant, put percevoir ces répliques :

— Que l’on avise les prisonniers d’être prêts à quitter le navire cette nuit.

— Bien. La jeune fille est sur le pont avec Fraü Margarèthe.