Aller au contenu

Page:Ivoi - La Mort de l’Aigle.djvu/59

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— L’Empereur est le père de tout bon Français, dit-il d’une voix très douce. Je n’ai rien à te pardonner, mon enfant… Qui es-tu ?

— Espérat Milhuitcent, répondit le gamin, dont le visage rayonnait…

— Et celui qui t’accompagne ?

— Bobèche.

Les sourcils de Napoléon se froncèrent légèrement :

— Bobèche, répéta-t-il… le comédien du boulevard du Temple, dont les lazzis amusent les salons royalistes…

Le blâme qui allait s’échapper de ses lèvres fut arrêté par l’artiste. S’inclinant avec aisance, celui-ci dit d’une voix grave :

— Le pitre frondeur est mort, Sire. C’est Antoine qui est devant vous, Antoine, fils d’un combattant de Valmy, qui veut, ainsi que son père le fit, défendre le pays contre l’invasion.

Il n’y avait pas à se méprendre sur la sincérité du brave garçon.

— Eh bien, Antoine, reprit l’Empereur d’un ton bienveillant, approchez… Asseyez-vous là, près de moi… avec votre jeune ami… et expliquez-moi votre présence ici.

Puis avec cette bonne grâce native qui lui avait conquis tant de dévouements :

— Seulement, Antoine, quand se lèveront des jours meilleurs, ressuscitez Bobèche. Il avait bien de l’esprit, ce comédien… et son cœur français lui donnera le droit d’en avoir encore davantage.