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Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/115

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et bientôt la petite troupe fila, à bonne allure, sur la route, en sens inverse de la direction du port.

La litière bleue tenait la tête.

— Vous savez où nous allons, cria Albin au chef Fargut, lequel, muni d’une longue canne dorée, courait sur le flanc de la caravane ?

L’homme salua de son bâton.

— Oui, seigneur !

— Alors, je me laisse conduire.

Mollement bercé par le pas rythmé des porteurs, le jeune homme s’abandonna à ses réflexions.

Pour un Parisien, accoutumé au train train journalier de la grande ville il y avait matière à rêver.

Depuis le jour où il croyait faire au café Richissime son dernier repas, la vie lui apparaissait comme une pièce à spectacle, une féerie pour mieux dire.

Brusquement transporté dans l’archipel malais, emprisonné, puis rendu à la liberté au milieu de la plus belle nature du monde, environné maintenant par un luxe tout oriental, l’aventure devait prendre des proportions épiques à ses yeux.

Puis des images féminines se présentaient à son souvenir.

L’une inquiétante… Cette Rana dont l’amabilité à son égard lui apparaissait inexplicable.

L’autre charmante et regrettée. Cette jeune fille merveilleusement jolie, entrevue au débarcadère, et qui, si résolument, s’était jetée entre l’oncle François et lui-même.

Qui était-elle ?

N’avait-elle pas déclaré être la fille de l’oncle François ?

Albin croyait bien avoir entendu cela. Mais, à l’habitation du planteur, il avait vainement cherché la radieuse apparition.

Rien n’avait trahi la présence d’une jeune fille dans la maison.

À cette heure, Gravelotte se reprochait de n’avoir pas questionné son oncle, et il se découvrait une timidité insoupçonnée, car, il lui fallait bien se l’avouer, les paroles s’étaient arrêtées sur ses lèvres… il n’avait pas osé.

Pas osé, pourquoi ?