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Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/17

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pas une de leurs paroles, et que l’un de ces deux hommes était aussi un neveu de François Gravelotte, le planteur de Sumatra.

Albin et Morlaix écoutaient.

Fleck prit la parole.

– Mon cher Herr Niclauss Gavrelotten, depuis quinze années, représentant de François Gravelotte en Europe, je dépose religieusement, à la Société Générale, les sommes afférentes aux bénéfices réalisés par cet homme éminent. Mais François est âgé, il est accoutumé à la vie de l’archipel malais ; s’il revenait parmi nous, toutes ses habitudes seraient profondément troublées, et probablement un trépas prématuré serait le résultat de l’expérience.

– Pauvre oncle ! soupira Niclauss d’un ton pénétré.

Son interlocuteur lui secoua amicalement la main :

– Nos cœurs sont à l’unisson, croyez-le bien, Herr Gavrelotten… tout à fait à l’unisson… Quand me vint la pensée funèbre que j’exprimais à l’instant, je cherchai le moyen d’empêcher le digne planteur de rentrer dans notre vieille Europe. C’était son salut auquel je m’ingéniais. D’autre part, en prolongeant sa vie, je vous faisais tort, à vous, son héritier, que j’aime comme un fils.

– C’est vrai, au fait ! s’exclama le jeune homme en relevant brusquement la tête.

– D’où le problème suivant : conserver à François l’existence et ses immenses propriétés de Sumatra ; assurer à Niclauss les millions déposés à Paris.

– Ce cher ami !

– Et ce qui donnait une acuité toute particulière à la solution du théorème, continua Fleck, enchanté de voir que ses raisonnements spécieux pénétraient sans difficulté dans le cerveau débile de son compagnon, une acuité exceptionnelle, pourrais-je prétendre, c’est que le bonheur de ma Lisbeth chérie m’apparut ne devoir faire qu’un avec votre propre félicité.

À ces mots, la jeune fille rougit, roula ses yeux en tous sens et murmura cette parole bizarre :

– Hypoxide !

Niclauss la considéra d’un regard stupéfait.