Aller au contenu

Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/265

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fauves, les deux cousins se trouvent seuls dans l’arène ainsi ménagée.

— Ah ! gémit Niclauss, est-ce qu’ils vont nous livrer à ces vilaines bêtes ?

— J’espère que non, murmure Albin.

— J’ai ouï dire, à l’Académie (collège en Allemagne), que les Romains se livraient à des expériences de ce genre dans leurs cirques.

— Sans doute, sans doute, cousin Niclauss, mais leur but n’était pas de conduire les acteurs au mariage.

L’Allemand n’eut pas le loisir de répondre.

Un esclave, tout vêtu de pourpre et de noir, s’arrêtait devant les Européens, tendant à chacun d’eux une lance longue d’environ deux mètres, terminée par une lame solide et aiguë, que limitait un croisillon analogue à celui d’une épée-baïonnette.

— Pour quoi faire ? interrogea Gravelotte.

— Pour mettre le tigre à mort, riposta l’indigène en s’éloignant.

Du coup, Albin pâlit légèrement ; quant à Niclauss, il faillit tomber à la renverse et laissa choir sa lame, qu’un guerrier lui ramassa obséquieusement.

Mais l’Allemand n’eut pas le loisir de récompenser cette attention par un remerciement bien senti.

Un coup de sifflet strident déchira l’air.

Avec un ensemble parfait, les guerriers frappèrent les dalles du talon des lances, puis pivotant sur le pied gauche, se mirent en arrêt, présentant à la cage un rempart de pointes acérées.

Au même instant, grâce à une ficelle manœuvrée à distance, les verrous de celle-ci furent tirés, un panneau de l’enceinte grillée s’abattit, démasquant deux superbes tigres qu’aucun obstacle ne séparait plus des spectateurs.

Niclauss tomba assis de peur, en geignant d’un ton lamentable :

Tarteifle !

Une clameur immense couvrit sa voix. Toute l’assistance hurlait, frappait des tamtams, des tympanons, des tambours. L’orchestre faisait rugir les instruments de cuivre, siffler les flûtes, crisser, les cymbales, gronder les timbres.